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Dans le secteur industriel, d autres facteurs peuvent également intervenir. Souvent ce que les économistes appellent un marché dual est nécessaire pour qu une innovation puisse décoller. Les préférences des consommateurs ont leur importance, mais pour l iPod, par exemple, Apple à réussi à convaincre des labels discographiques de s associer à l iTunes store, ce qui a permis de faire de l iPod une « application révolutionnaire ».
Le dernier acte appartient, naturellement, au marketing face à des consommateurs versatiles une activité complexe qui devient de plus en plus compliquée même si la compréhension du processus par les spécialistes s approfondit.
Il y a un corpus théorique établi de longue date sur la manière dont les innovations sont généralement diffusées sur le marché. Il y a plus de 50 ans, Everett Rogers étudia la manière dont les nouvelles idées étaient adoptées par des réseaux de personnes ; il découvrit que la diffusion d une innovation passait par des phases bien identifiées, qu il s agisse des médecins de l Iowa ou des paysans de l Amérique du Sud.
Plus récemment, les modèles théoriques sont devenus plus complexes. Dans son nouveau livre, The Tipping Point, Malcom Gladwell a vulgarisé l idée selon laquelle le comportement d un petit groupe clé de personnes influentes peut amener d importants changements de comportement des gens, presque du jour au lendemain.
Jacomo Corbo, un chercheur spécialisé dans la gestion des opérations et de l information à Wharton, affirme que le budget du marketing viral dépasse actuellement 1,6 Milliard de $ et augmente de 30 pour cent par an. Souvent, les lancements de produits sont conçus de manière à contenir un élément viral. À titre illustratif, Google a utilisé cette idée dans son déploiement de gmail.com, en rendant la première utilisation de Gmail possible uniquement « sur invitation », selon Corbo.
Le prix est un autre élément incitatif déterminant dans l adoption d une nouvelle technologie. Souvent, les consommateurs précoces paient plus. Au-delà de la maximisation du prix, un prix élevé est appliqué pour accroître la valeur perçue du produit, ce qui encourage en particulier les utilisateurs influents et rehausse souvent son prestige.
Cependant, pour d autres technologies, un bas prix ou même la gratuité- est souvent appliqué pour essayer d encourager la diffusion. Les marchés duals, comme les systèmes de jeu vidéo, peuvent être plus enclins à adopter ce type de tarification modérée, parce que les gains de la firme sont encore plus substantiels si elle peut devenir une norme de l industrie. Une plateforme de jeu par exemple aura nettement plus de valeur pour les développeurs si elle bénéficie d une large base d utilisateurs que si elle est seulement adoptée par quelques personnes, ce qui implique que le fabricant de consoles de jeu a intérêt à distribuer la console auprès d un public aussi large que possible.
Apple applique souvent ce type de tarification dans un but purement stratégique. Aux États-Unis, le prix du nouvel iPad est ainsi fixé à 499$, ce qui le place à la hauteur du Kindle d Amazon exactement le genre de concurence auquel il faudrait s attendre dans une bataille pour devenir la plateforme dominante de e-reading.
Cependant, en Chine, la société Cupertino est en train d essayer une approche différente. L iPhone coûte très cher là-bas, note Corbo, ce qui permet de réduire les problèmes de chaîne d approvisionnement, et en même temps de rehausser son prestige auprès des personnes influentes.
Un facteur qui compliquera certainement encore plus ces stratégies dans les années à venir est que ce n est pas seulement la diffusion qui est virale de nos jours, : les inventions le sont aussi. Comme de plus en plus de sociétés sont en mesure d observer leurs clients en temps réel, les offres peuvent être ajustées presque en temps réel. Par exemple, Google publie toujours ses systèmes en version bêta, dit Corbo, et ensuite fait des modifications dès qu elle reçoit un feedback de ses utilisateurs.
Pour finir, la raison pour laquelle une invention devient un succès reste toujours un mystère. « Bien entendu, il y a des recettes » affirme Demeure : « impliquer les concepteurs, des personnes appartenant à des domaines différents et aussi des groupes d utilisateurs au moment de démarrer et de concevoir les services et les technologies qui les sous-tendent. Mais il y a toujours des surprises. »
Demeure se souvient d un jour il y a environ dix ans, lorsqu elle entendit des informaticiens de son département, de retour d une démonstration à laquelle ils avaient assisté chez l un des principaux opérateurs européens de téléphonie. « Ils sont revenus et ils se moquaient d une des présentations qui avaient été faites. Vous savez ce qu ils ont inventé ? Utiliser un téléphone pour envoyer un message texte ! Ils trouvaient cela complètement idiot. Je me rappelle que durant le déjeuner, ils en riaient. »
Pour chaque iPod, iPhone vendu -ou peut-être bientôt iPad- des centaines de nouveaux produits technologiques sont des flops. Même le PDG de Apple a eu son lot d échecs.
Qu est-ce qui différencie les gagnants des perdants ? Des spécialistes de ParisTech et de Wharton School à Philadelphie qui ont étudié la diffusion des technologies estiment que plusieurs facteurs déterminent le succès d un produit- et qu avec la numérisation, le processus devient toujours plus complexe.