Les délégués d une trentaine de pays de l Union africaine (UA) tentaient mardi à Yaoundé, lors d une réunion en prélude à celle des ministres de l Economie et des Finances jeudi et vendredi, de trouver un consensus sur les mécanismes innovants de financement, objectif fixé en 2001 à Lusaka en Zambie.

"Les débats évoluent lentement mais sûrement, parce que nous avons effectivement des réticences de la part de certains pays qui pensent que les instruments que nous voulons privilégier produiraient des impacts négatifs sur leurs économies", a souligné à Xinhua le directeur des affaires économiques de la Commission de l'UA, René N'Guettia Kouassi.

"Nous sommes en train de leur faire comprendre qu'en matière d'intégration il y a la question de solidarité et qui dit solidarité dit que dans ce cas d'espèce il y aura toujours des contributeurs nets et des bénéficiaires nets. Quel que soit l'instrument privilégié, il y a des pays qui paieront toujours plus et d'autres qui paieront toujours moins", a-t-il ajouté.

Contre une dizaine lundi dans la matinée, une trentaine de pays ayant confirmé leur participation sont finalement représentés à ces travaux organisés à quelques semaines du prochain sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA en janvier 2011, censés se prononcer par une décision sur ce sujet sur la base des recommandations des ministres de l'Economie et des Finances découlant pour leur part des propositions des délégués de leurs pays à Yaoundé.

Lancée en 2002 sur les cendres de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) créée pour sa part en 1963 au lendemain des indépendances d'une majorité de pays africains, l'UA a hérité de son ancêtre deux sources de financement en faveur de son processus d'intégration continentale : la contribution statutaire des Etats membres et celle des partenaires au développement du continent.

Le constat établi est que ces sources de financement, jugées dérisoires, fluctuantes et incertaines, révèlent aujourd'hui des "insuffisances à la fois bloquantes et paralysantes" dans la réalisation des "projets et programmes (ayant) connu une croissance quasi-exponentielle de 1963 à ce jour", observe M. N'Guettia Kouassi.

A l'instar du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) adopté en 2001, la plupart de ces projets et programmes connaissent des fortunes diverses dans une Afrique qui, chroniquement, doit faire face à des conflits, affronter les catastrophes naturelles (inondations, sécheresse, éruptions volcaniques, etc.), les crises alimentaires et énergétiques puis les endémies et les pandémies telles que le VIH-SIDA.

Comme conséquence, l'insuffisance et l'instabilité des ressources fait que le continent est obligé de recourir aux financements extérieurs provenant des partenaires au développement. C'est le cas par exemple pour toutes les opérations de paix telles que celles en cours au Darfour au Soudan, en Somalie et en République démocratique du Congo (RDC).

Cette tendance se traduit dans les chiffres du budget programme de l'UA et ses organes au fil des années. En 2010, sur un total de 144,861 millions USD, 77% proviennent de ces partenaires extérieurs. Les bilans antérieurs établissent 84% en 2009 sur un montant global de 68,681 millions USD, 69% en 2008 sur 47,069 millions USD et 73% en 2007 sur 49,687 millions USD.

Pour les financements innovants, l'UA a défini à la suite d'une série d'études 8 scénarii soumis à la réflexion des délégués des pays réunis à Yaoundé. "Les mécanismes proposés, nous avons la taxe sur les billets d'avion, le prélèvement sur les importations, le prélèvement sur la prime d'assurance, le prélèvement sur les exportations des hydrocarbures, un pourcentage sur les budgets nationaux, etc.", a indiqué à Xinhua M. Nguettia Kouassi.

"Les pays proposent d'autres solutions telles que les taxes sur les transactions financières, les taxes sur les survols des espaces (aériens) régionaux. Ils préconisent que l'Union africaine fasse des investissements productifs, peut-être qu'elle essaie d'avoir un patrimoine immobilier pour rapporter des fonds propres. Dans notre démarche, il faut que ces nouvelles propositions fassent l'objet d'études approfondies pour qu'à l'avenir on puisse les considérer comme sources alternatives de financement", a-t-il poursuivi.

Malgré les réticences annoncées, il se dit au demeurant optimiste pour un consensus dans la capitale camerounaise. Pour lui, les raisons des blocages sont liées au fait qu'"au niveau de l'Afrique, il n'y a pas un suivi régulier de ces dossiers. Parce que les délégations changent toujours de personnes, il n'y a pas de suivi dans les administrations, les ministres changent, les experts sont affectés à d'autres postes".

Le résultat est évident : "Chaque fois que nous avons une réunion sur cette question, les experts sont différents. Ce qui fait que nous avons l'impression de connaître un recommencement perpétuel. C'est ce que nous voulons éviter, compte tenu de la décision de Kampala qui invite la Commission à tout mettre en Suvre pour faire des propositions concrètes au mois de janvier. Je crois que les experts ont compris cela, ils sont en train de délibérer en connaissance de cause".