Pendant que le nouveau président de la Russie, Vladimir Poutine, entame une nouvelle phase de croissance économique, des experts du commerce gardent un œil vigilant sur les politiques de Moscou avec le continent africain, qu'ils considèrent comme une immense source inexploitée d'opportunités économiques

Mais des experts, comme Dmitri M. Bondarenko, vice-directeur de la recherche à l'Institut des études africaines à l'Académie des sciences de Russie et un critique de longue date de la relation stagnante du pays avec l'Afrique sous l'administration de Dmitri Medvedev, ne gardent pas bon espoir que le nouveau président apportera un quelconque changement.

La Russie a beaucoup à offrir aux pays africains et les deux régions peuvent facilement travailler ensemble pour créer les meilleures conditions possibles pour leurs entrepreneurs afin de développer des liens économiques mutuellement bénéfiques.

Plusieurs compagnies russes comme 'Russian Aluminuim' (RusAl), LUKoil, Gazprom, et Renova, sont prêtes et attendent pour offrir des services financiers et bancaires tandis que d'autres lorgnent les industries manufacturières locales sur le continent.

Pourtant, plusieurs exportateurs potentiels africains continuent de nourrir des perceptions négatives par rapport au marché russe, souvent en le comparant de manière défavorable aux opportunités d'exportation offertes par les Etats-Unis, l Europe et de plus en plus par les pays qui composent le groupe BRICS, dont la Russie fait partie  tels que le Brésil, l'Inde, l'Afrique du Sud et, en particulier, la Chine.

En octobre 2011, s exprimant au cours d une interview exclusive accordée à la 'Voice of Russia' (Voix de la Russie), 'Echo of Moscow' (Echo de Moscou) et à la 'Radio of Russia' (Radio de la Russie), le ministre des Affaires étrangères, Serguei Lavrov, informait les auditeurs que "le chiffre d'affaires des échanges commerciaux de la Russie avec les pays africains se situe actuellement à quatre milliards de dollars, tandis que celui de la Chine avec ces pays s'élève à 120 milliards de dollars".

Une étude des statistiques des échanges commerciaux de la Russie entre 2001 et 2011 montre un développement très faible sur le continent; dans cette même décennie, les produits chinois sont devenus très visibles dans les marchés africains, tandis que les articles traditionnels africains se retrouvent également souvent sur les rayons en Chine.

Fyodor Loukyanov, un membre supérieur du Conseil de la politique étrangère et de défense et rédacteur en chef du célèbre journal 'Russia in Global Affairs' - la source la plus autorisée de la politique étrangère de la Russie et les développements mondiaux - a reconnu que la stratégie de la Chine est purement basée sur l'accès aux ressources naturelles comme le pétrole et les minéraux qui sont d'une importance vitale pour le développement du pays.

Beijing a utilisé tous les outils possibles pour obtenir ces ressources, notamment l énergie douce, l assistance technique et économique ainsi que l appui politique aux dirigeants des pays qui ont été boudés par le reste de la communauté internationale, y compris à Robert Mugabe du Zimbabwe et à Omar al- Bashir du Soudan.

Mais la Russie, une nation riche en ressource et en minéraux, a peu besoin d'obtenir ces biens en s impliquant dans des conflits controversés, et on ne peut pas s'attendre qu elle rivalise de façon acharnée avec la Chine dans ce domaine, a expliqué Loukyanov.

Pourtant, des experts du commerce dans le pays pensent qu'il est très important que les autorités russes utilisent les diplômés formés en Union soviétique comme un pont vers une relation d'affaires avec l'Afrique en particulier, malgré l'influence croissante de la Chine.

La présence de Moscou en Afrique a diminué après la chute de l'Union soviétique, puisque les pays africains se sont davantage tournés vers les Etats d'Asie, notamment la Chine et l'Inde, pour une coopération économique mutuelle.

Les activités soviétiques en Afrique étaient largement basées sur la logique de la guerre froide, lorsque deux superpuissances s affrontaient à travers le monde pour étendre et renforcer leur influence idéologique. L'Afrique, avec ses énormes réserves de ressources humaines et naturelles, était indispensable pour les deux parties.

Mais après l'effondrement de l'Union soviétique, l'Afrique a disparu de la politique étrangère russe.

Pour aggraver les choses, les médias russes écrivent très peu sur l'Afrique. Si la presse et le secteur non gouvernemental prennent des mesures pour accroître les connaissances et la sensibilisation sur les possibilités d'une meilleure coopération, ces connaissances stimuleront immédiatement une augmentation de l interaction économique.

Jonathan Fianu, un entrepreneur africain né en Grande-Bretagne et directeur général de 'PPP Local Ltd', un cabinet conseil russo-britannique opérant dans la région de la Russie, croit qu'il y avait quelques progrès positifs faits par l'administration Medvedev pour mener une politique plus active en Afrique, ce qui a déclenché un débat plus actif sur ce qui peut et devrait être fait.

En juin 2009, Medvedev a même visité quatre pays africains, notamment l Egypte, le Nigeria, la Namibie et l'Angola - dans un effort visant à construire une meilleure relation.

Afin de renforcer des liens faiblissant entre les deux régions, Medvedev a également nommé le sénateur russe, Mikhail Marguelov, comme son envoyé spécial pour la coopération avec l'Afrique en mars 2011, mais malheureusement, la rhétorique diplomatique de Margelov n a pas réussi à s enraciner dans le sol africain.

Harry Verhoeven, un enseignant de la politique africaine à l'Université d'Oxford, au Royaume-Uni, a expliqué à IPS que "la Russie a poursuivi son commerce traditionnel d armes sur le continent, notamment avec des régimes controversés comme les dirigeants militaro-islamistes de Khartoum (Soudan). Pourtant, au total, malgré cette activité, la plupart des Africains considèrent la Russie comme un acteur secondaire, qui n'a nullement la même importance que l'Union européenne (ou ses trois principaux Etats membres), les Etats-Unis, la Chine ou l'Arabie Saoudite".

"Il revient désormais à la prochaine administration (désormais dirigée par Poutine) d'agir de manière positive pour mener une politique harmonieuse de développement des affaires et des échanges commerciaux", a déclaré Fianu à IPS.

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