Tara Durotoye, la juriste nigériane qui construit un empire cosmétique africain

Tara Fela –Durotoye, entrepreneur visionneur et avocate nigériane est la fondatrice de House Of Tara, leader nigérian de la beauté et des cosmétiques. Mais, House of Tara ne se contente plus de la domination locale : son activité tripartite (studio de beauté, école de maquillage et gamme de produits cosmétiques Orekelewa) affiche désormais l’ambition de créer une centaine d’enseignes en Afrique subsaharienne d’ici les cinq prochaines années.

L'expansion du réseau de service et de distribution agressive est actionné par la puissance économique croissante de la femme nigériane moyenne et sa préférence pour le style occidentale ; des facteurs qui alimentent l’énorme demande de la part des entreprises autochtones et internationales qui en tirent profit.

Les grandes marques internationales comme L'Oréal, le plus grand fabricant de produits de beauté du monde, ne sont pas encore installés localement. En quête de marques locales qui comprennent la vente au détail des produits cosmétiques et qui possèdent une infrastructure évolutive, ils ont proposé à House of Tara (HOT) des ententes de distribution nationales pour une présence plus forte et plus inclusive.

Tara Durotoye, fondatrice et PDG de HOT, a construit l'entreprise il y a une quinzaine d’années. Elle est maintenant à la tête de 15 magasins avec plus de 4000 représentations indépendantes. Elle révèle sans enthousiasme que le chiffre d'affaires des enseignes les plus rentables de la marque – l’unité de vente au détail comprenant les droits de distribution des produits L'Oréal comme Mabling – va d’1 à 5 milliards de nairas (plus de 30 millions de dollars). Une stratégie bien structurée permettra à l'entreprise de tirer parti de la forte expansion de son service de maquillage, son école et sa gamme de produits Orekelewa.

L’objectif afficher est d’attirer non seulement les clients potentiels qui recherchent un produit étranger comme Maybelline, mais aussi ceux qui sont en quête de maquillage nigérian. Le Polo Park, l’Ibadan Mall, le Delta Mall et le Cedi Plaza d’Abuja sont les circuits commerciaux modernes qu’adopterait HOT. En ce qui concerne le commerce traditionnel, la société cherche à ouvrir une enseigne à Asaba, Enugu, Uyo, Yenogoa, Akure, Ogbomosho, Makurdi, etc - une décision éclairée par le fait que ces États abritent son plus grand volume de consommation et de représentants de ventes. La société est structuré de manière à soutenir la concurrence mondiale avec les meilleures marques de beauté du monde et des compétences internes pointues en ressources humaines, communication, commerce de détail, stratégie et gestion de stocks.

L'argent n'est pas un problème

Ce schéma d'expansion nécessite toutefois un flot de ravitaillement financier. Bien que le manque d'accès au crédit conduit à la faillite ou la stagnation des petites et moyennes entreprises, l'activité de Tara qui a démarré il y a 16 ans en tant que petit service nuptiale porte-à-porte alors qu’elle était étudiante en droit, ne souffre plus de problèmes de trésorerie.

« Le financement est plus un défi », lance-t- elle.

Ayant autrefois besoin de 500 000 nairas (3000 dollars) pour garantir un magasin, elle a déploré plusieurs tentatives infructueuses à bénéficier d’un prêt bancaire. « Les banques ne pouvaient pas comprendre pourquoi quelqu'un paierait pour une cure de jouvence », songeait Tara en souriant. « Maintenant, les banques ont vu nos chiffres, nous avons assis notre crédibilité et elles ne sont plus réticentes à prêter ».

Bien qu’elle soit une artiste du maquillage expert, son succès n'est pas scellé. Son entreprise, nommée première entreprise de beauté par le premier ministre du Nigeria, bénéficie de plusieurs distinctions : le lancement du premier Répertoire nuptiale du pays en 1999, la création d'une norme internationale d’atelier maquillage, la mise en place de la première école de maquillage en Afrique de l'Ouest, de la première ligne de cosmétique du Nigeria (Orekelewa), et du premier parfum créé par un nigérian (le parfum exotique « Be Inspired » qui a été lancé en 2009).

Globenewswire décrit HOT comme une « marque fièrement africaine qui s’inspire de façon inédite et créative de la riche culture et du patrimoine Nigérian ». En 2012, HOT a été choisi comme maquilleur officiel de la Fashion Week d’ARISE Magazine pour sa connaissance approfondie de la beauté noire et sa ligne de maquillage complète.

Un impact social

Distinguée parmi les 20 plus jeunes femmes de pouvoir africaines en 2013, l'année dernière, à 36 ans, Tara Durotoye a été également élue Jeune leader mondial par le Forum économique mondial pour ses progrès entrepreneuriaux et sa tendance agressive pour l'autonomisation économique de la femme nigériane.

Son école de maquillage internationale fondée en 2007, a formé plus de 2000 diplômés de sexe féminin. Beaucoup de ses anciennes étudiantes ont fondé des startups de maquillage avec succès, créant des emplois et contribuant à la croissance de l'économie. Environ 4000 représentantes de vente indépendantes sont dénombrées à travers le pays, dont beaucoup sont des étudiantes ou des travailleuses autonomes qui gagnent actuellement un pourcentage sur la distribution des produits de HOT dans leurs régions respectives. Tara explique l'attention continue de la marque pour le canal de vente externe à la société qui crée plus d'opportunités pour les femmes, leur permettant de s'émanciper économiquement.

« Pour HOT, il n'est pas seulement question de faire de l'argent », lance-t- elle. « Il s'agit de l'investissement d'impact ».

Plus d'argent, plus de beauté

Euromonitor dans sa publication annuelle Color Cosmetic au Nigeria prévoie une croissance continue pour ce nouveau secteur. « Bien que traditionnellement grand au Nigeria, le secteur des cosmétiques de couleur est encore loin d'être mature en raison du faible revenu de beaucoup de femmes », lit-on. Selon les résultats de la Banque mondiale, plus de 60 pour cent de la population du Nigeria vit encore en dessous du niveau de la pauvreté ; une plus grande proportion d'entre eux sont des femmes en raison de l'inégalité des sexes en matière d'emploi. Heureusement, le Nigeria est devenu la première économie du continent, en croissance de 6%. Avec une classe moyenne de plus en plus large, disposant de davantage revenus et une plus grande influence occidentale sur les femmes, « la demande pour des produits de qualité va augmenter, stimulant la croissance », indique le rapport.

Une chose est certaine, le Nigeria est un énorme marché et la consommation des cosmétiques vient juste de décoller avec une tendance qui ne fait que commencer.

Le grand défi de House Of Tara est de réussir à utiliser sa plateforme de manière à ce que le consommateur qui veut des produits internationaux puisse en trouver chez HOT de la même façon que ceux qui préfèrent les marques locales. « Il serait bon pour nous de bénéficier des deux marchés », admet Tara. « Nous avons littéralement construit ce secteur, il est donc temps pour nous d’en profiter ».

 

Analyste sur Nextafrique.com.

Joie, bonne humeur, humour, mise en scènes, voilà ce qui me caractérise. Passionnée par l'art et le théâtre africain, je reste à l'affût de toute nouvelle bonne ou mauvaise.