Certains d entre vous  sourirons amèrement avant de répondre à cette question par un non retentissant! Les plus cyniques d entre nous ont peut-être déjà? commencé à accepter le fait que les comportements non monogames au sein d un mariage ou d une relation «sérieuse»  est une réalité. Mais nous préférerions ne pas remettre en question notre idéal de monogamie de peur de nous défaire d un système de pensée qui nous a permis de conserver notre croyance en l amour et au romantisme.

Dans son livre Sex at Dawn , le Dr Christopher Ryan affirme que la monogamie n'est pas dans la nature du comportement sexuel humain et que la conviction du contraire a été la cause des souffrances nombreuses dans les relations amoureuses.

Le but de cet article n'est cependant pas de se demander si les humains sont naturellement câblés pour être monogames ou non. Il s'agit de savoir si notre croyance aveugle en la fidélité de nos partenaires (parce qu'ils sont "différents des autres personnes qui trichent", ou ont des convictions, ou aiment leurs enfants), est en réalité la raison pour laquelle les Africains, particulièrement les femmes dans des relations engagées, courent un risque accru d'infection par le VIH.

La grande question serait donc:  La conviction socio-culturelle et religieuse que la monogamie existe pourrait-elle l'un des obstacles à la réduction du VIH / SIDA en Afrique? Je ne pose pas la question avec désinvolture. J'ai regardé ou entendu parler de trop de femmes dans mon quartier, dans ma famille, des amis proches et connaissances qui  meurent du VIH / sida ou sont en risque d'infection, en raison de leur conviction que leurs maris étaient fidèles, et d'aimer et de différent.

Les femmes dont il est question ne sont pas des femmes violées par leur mari, ou forcées d'arrêter l'utilisation du préservatif par des partenaires dominants. Ces femmes ont des mariages apparemment heureux, leurs partenaires les respectent en apparence et se sont engagés à veiller sur le bien-être de leurs familles. Leur seule erreur est d'être tombées dans le piège de la conviction que l'engagement dans un mariage les isole de l'infection.

Des recherches menées par le Conseil mondial pour la santé dans des pays africains comme l'Ouganda, la Zambie et le Kenya suggèrent que les femmes mariées y ont un risque d'infection au VIH plus élevé en raison de l'hypothèse que le mariage offre une sécurité sexuelle, et que leurs partenaires sont fidèles.

Un témoignage récent m'a interpellé. Abdoul* a raconté avoir sollicité des prostituées. Il y avait un effort soutenu par un certain nombre de ses proches pour garder cette réalité loin de sa femme parce que préserver le mariage et la structure familiale était le plus important.

Le plus notable ici est l'énergie dépensée pour essayer de convaincre la femme que son mari était monogame. À l'ère de la pandémie mortelle qui a visité la race humaine dans le monde entier et en Afrique en particulier, devons-nous considérer sérieusement l'importance de reconnaître que la croyance en la monogamie, bien qu'étant un idéal admirable et digne, nous cause plus ennuis que nous serions prêts à admettre? Ceci particulièrement lorsque l'on fait fi de la prudence en raison de l'engagement perçu de nos partenaires.

Il est facile de comprendre pourquoi la plupart des gens préfèrent ne pas s'engager dans la conversation. Nos relations constituent parfois la partie la plus sacrée de notre expérience humaine et il est difficile de se réconcilier avec le fait que la personne que nous aimons et en qui nous avons le plus confiance pourrait être infidèle. Mais avouons-le, la pratique de la monogamie ne semble pas si répandue que cela lorsqu'on commence à prêter une attention consciente aux pratiques sexuelles qui nous entourent dans notre vie quotidienne.

Pensez-y, combien d'hommes ou de femmes autour de vous sont convaincus que leur partenaire est fidèle ou soupçonnent qu'il/elle ne l'est pas mais choisisent de ne pas chercher plus loin. Pourtant, chacun autour d'eux, y compris moi ou vous, savons pertinemment que son partenaire a déraillé. Mais le désir de maintenir l'illusion de la monogamie (et franchement, la peur d'être accusé d'ingérence) signifie que nous aurions préféré enterrer le problème au lieu de prévenir un ami d'une situation potentiellement mortelle.

Peut-être que les campagnes de sensibilisation, en se concentrant essentiellement sur des aspects plus techniques de la transmission (l'utilisation du préservatif, les dépistages, etc), ont été limitées. Peut-être que dans les sociétés africaines, nous avons tâche plus difficile de venir à bout de l'acceptation du fait que nos partenaires peuvent ne pas être aussi monogames que nous le pensons. Si plusieurs d'entre nous avaient accepté ce fait, alors non seulement nous nous serions épargnés le préjudice émotionnel engendré par l'expérience d'être "trompé", mais nous nous serions sauvés d'une conséquence encore plus meurtrière d'une infection mortelle. Parce que la vérité semble être que nos proches sont très probablement engagés dans d'autres relations sexuelles que l'on veuille y croire ou pas.

Bien sûr, la question de la procréation devient une considération encore plus difficile au sein de cette conversation, mais je ne vais pas tenter d'y répondre dans cet article.

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* Nom d'emprunt

Analyste sur Nextafrique.com.

Carole Ouédraogo est passionnée d'anthropologie, domaine dans lequel elle poursuit une thèse.