De la politique du produit à la politique de communication en passant par celles du prix et de la distribution, les facilitateurs ont passé en revue les piliers du marketing devant des femmes jusqu’ici habituées à transformer des produits sans chercher à maitriser les prix de vente aux consommateurs, à penser les circuits de distribution ou aux types de communication adéquats en vue de la séduction et de la fidélisation du client.
C’est la maison des aînés à l’ACI 2000 qui a abrité le séminaire de formation organisé par la Coordination nationale des organisations paysannes avec l’appui de l’Ong Oxfam. Venues de Sikasso, Kayes, Mopti, Ségou, Bla, Koulikoro et Bamako, les femmes transformatrices et productrices ont découvert les nouvelles techniques d’approche qu’offre le marketing.
Quel enjeu ?
Au Mali, la transformation est une affaire de femmes, c’est aussi un enjeu majeur du développement agricole et économique. En effet, les marchés maliens sont inondés par les produits importés (boîtes de conserve, concentrés de tomate, pâtes, lait en poudre, confiture de fraises…). Soutenir la fabrication locale de ces produits avec des matières premières agricoles locales favorisera les investissements locaux et développera les emplois autour de l’agriculture.
A travers le développement de l’entreprenariat féminin, ce projet a pour objectif de renforcer les capacités des femmes transformatrices dans leurs coopératives en favorisant la prise de responsabilité au sein des organisations professionnelles locales, régionales et internationales, en améliorant leurs conditions socio-économique de ses femmes et en développent leur autonomie. Cet objectif contribue à la reconnaissance des doits des femmes dans une société où ils sont souvent bafoués (surexploitation, main d'œuvre gratuite, exploitation sexuelle, victimes de violences...).
Ainsi, soutenir la formation et l’émancipation de leaders dans ces coopératives de femmes qui seront des exemples dans leurs famille et villages, semble être une priorité du développement. C’est aussi le cœur de métier d’Afdi : le développement agricole doit passer par la structuration et le renforcement des organisations paysannes dans le cas de ce projet, féminines.
La sécurité alimentaire des pays du Sud passe par le développement de leur agriculture familiale et donc par l’implication des femmes dans les processus techniques, organisationnels et commerciaux de la production ainsi que dans les prises de responsabilités au sein de leurs organisations paysannes, notamment des coopératives.
Difficultées dans le secteur
Les femmes transformatrices maliennes évoluent dans un contexte difficile pour plusieurs raisons :
D’abord, bien que représentant 52% de la population, les femmes maliennes sont souvent marginalisées et défavorisées. Seule 12,1 % d’entre elles sont alphabétisées contre 48,3% chez les hommes car plus de 71% d’entre elles n’ont aucune instruction après 15 ans et que seul 53,7% des petites filles (en dessous de 15 ans) vont à l’école (contre 75,3% pour les garçons)
Conscientes des déséquilibres hommes/femmes à travers le monde, les Nations-Unies se sont d’ailleurs fixé des Objectifs Millénaire pour le Développement dont « promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation de la femme ».
D’ailleurs, lors de la préparation de ce projet avec les deux coopératives à l'initiative du programme, beaucoup d’entre elles ont souligné la frustration de n’avoir pas pu aller à l’école et d’être très handicapées aujourd’hui, surtout que d’un point de vu commerciale régional et national, tout se passe en français : elles n’ont pas accès à l’information, elles ne peuvent pas répondre à des propositions commerciales et encore moins en initier, elles ne peuvent pas peaufiner leurs étiquettes… Ce projet veut donner des outils à des coopératives de femmes pour pouvoir aller à l’avant de leurs développement et être un exemple pour les autres femmes du Mali.
Pour Mme Diallo Fatim de la coopérative Femmes en Action, lauréate du prix malien de la qualité, « les femmes transformatrices sont confrontées à de sérieuses difficultés liées à l’accès aux financements, aux techniques de commercialisation, à la lenteur des recouvrements de créances et parfois aux diktats de certains industriels qui imposent des prix bas que nous sommes obligées d’accepter pour ne pas perdre de grosses commandes ».
Madame Bamba Fatim de Sikasso dira pour sa part que «l’emballage est un des grands problèmes des femmes transformatrices. Nous avons du mal à faire des emballages de qualité parce qu’ils coûtent chers et renchérissent les prix de nos produits.
L'autre constat est que les procédures d’homologation et de certification des produits transformés par des structures comme l’Agence nationale de la sécurité sanitaire des aliments ou le laboratoire national de la santé sont longues et coûteuses d’où le refus des femmes transformatrices à tenter tout processus de labellisation des produits ».
Oxfam, l’Union des producteurs maraîchers et la coordination nationale des organisations paysannes ont répertorié les préoccupations des femmes transformatrices afin de trouver des solutions idoines susceptibles de valoriser les produits locaux qui, bien présentés, peuvent rivaliser avec les bouillons industriels, les savons importés et la viande séchée importée. Pour rappel, les femmes transformatrices commercialisent des savons à base de beurre de karité, de neems, de miel, des bouillons en poudre, des bouillons de poisson, de la mangue séchée, du fonio précuit et bien d’autres produits sans additif chimique.