Six ans après la rédaction d une charte de la diversité, l'Association des DRH s interroge sur les avancées en la matière. Dans un contexte de crise de l'emploi, la diversité est-elle passée de mode à La diversité a-t-elle fait son temps?
En 2004, naissait la charte de la diversité, et le mot à la mode était dans toutes les bouches. Un ministère délégué à la promotion de l égalité des chances a vu le jour. Les entreprises pouvaient participer à la danse en décrochant leur label diversité et même les écoles s y étaient mises. Après la prépa intégrée de Science-po destinée aux lycéens originaire de quartiers dit « difficiles », d autres grandes écoles l ont suivi en mettant en place des tutorats. Cela c était avant.
Depuis, la crise est passée par là et, dans un marché tendu de l emploi, la diversité n est plus aussi attractive. « Dans un contexte de crise, les entreprises recrutent des personnes qui leur ressemblent : qui ont fait les mêmes études, sont passées par les mêmes écoles, qui font parties de leur réseau », se désole Sylvie Brunet, directrice des affaires sociales du groupe Onet Propreté, lors du colloque de l Association nationale des DRH sur la diversité du 25 novembre 2010. Un recrutement par clonage qui entaille sérieusement la diversité.
D après une récente étude de l Insee, 79 % des enfants dont les 2 parents sont nés en France occupent un emploi contre 66 % dont les deux parents sont nés à l étranger. Ce taux redescend même à 61 % si ces derniers sont nés au Maghreb et 59 % en Afrique sub-saharienne. La faute à la crise. Vraiment ? Pas sûr qu avant cela marchait tellement mieux.
Une République « une et indivisible »
« A la question où en est-on de la diversité ? J ai envi de répondre sommes-nous réellement partis, s insurge Patrick Gagnaire, délégué général de l association Solidarité au sein de PPR. Les mesures se sont certes succédé, mais sont restées dans le déclaratif, le narratif. Un colloque sur la diversité, un label, des rapports, tout cela est bien sympathique. Mais le hic est qu il n existe toujours pas d instrument de mesure pour la diversité. Et une politique dont on ne peut mesurer la progression est nulle. »
Dans son rapport rendu en mars 2009, Yazid Sabeg, commissaire à l égalité des chances, avait défendu l idée que le critère de l origine devrait être pris en compte dans les enquêtes sur la diversité. Un tollé. Dans une France marquée par l idée d une République « une et indivisible », parler d une catégorie « origine » revient au blasphème. Marc Dubourdieu, directeur général de la Halde, a décidé de reprendre le bébé.
« Pour répondre à une forte demande des entreprises. Nous nous sommes associés à la Cnil pour construire un outil-méthode qui leur permettrait de mesurer leur progrès en matière de diversité. Il devrait voir le jour en avril prochain. » En attendant, de savoir comment les deux institutions ont pu se dépatouiller de l approche républicaine, d autres dispositifs doivent être mis en place affirment les autres intervenants.
Sensibiliser, former et informer
« Il faut passer à la vitesse supérieure, pense Véronique Poinssot, chargée de mission Egalité à la Direction générale de l administration et de la fonction publique. Les mesures en matière de diversité doivent suivre ce triptyque : sensibiliser, former et informer. La sensibilisation a bien été faite. Alors que, quelques années auparavant, la notion de responsabilité sociale des entreprises n enfermait que les sujets de développement durable et de finance, aujourd hui les problématiques humaines y sont associées.
L on peut dès lors se concentrer sur la formation et l information. » Charlotte Duda, DRH du groupe Stream International, spécialisé dans la maintenance informatique acquiesce. Et elle ajoute que pour elle « dans le domaine de l information, il s agit surtout de montrer aux DRH que les outils pour un recrutement diversifié existent et qu il n est pas difficile de les mettre en place. » Plus qu une diversité passée de mode, l assemblée composée de DRH s accorde à dire que ce sont les outils qui deviennent obsolètes.
Un article de Lucile Chevalier pour emploi-pro.fr