Après une longue période de croissance économique solide, l’Afrique subsaharienne devrait connaître une deuxième année difficile car la région subit des chocs multiples, a annoncé aujourd’hui le Fonds monétaire international (FMI). Selon l’édition d’avril 2016 des Perspectives économiques régionales pour l’Afrique subsaharienne, intitulée Un changement de cap s’impose, la croissance devrait tomber à 3 % pour l’ensemble de la région en 2016, soit le taux le plus bas depuis une quinzaine d’années, mais avec des différences considérables d’un pays à l’autre.
Si les perspectives restent favorables, la croissance se situe bien en deçà des 6 % auxquels on s’était habitué au cours des dix dernières années, et son rythme est à peine plus rapide que la croissance démographique. « L’Afrique a besoin d’un profond recalibrage des politiques pour exploiter son énorme potentiel », a déclaré Antoinette Sayeh, Directrice du Département Afrique du FMI. « C’est particulièrement urgent dans les pays exportateurs de produits de base et certains pays ayant accès aux marchés, car la riposte des pouvoirs publics a en général été insuffisante jusqu’à présent. »
Le ralentissement s’explique par les retombées négatives de la chute des cours des matières premières sur certains des principaux pays et, plus récemment, par la sécheresse qui sévit en Afrique de l’Est et en Afrique australe. Le net repli des prix des produits de base, un choc d’une ampleur sans précédent, a mis à rude épreuve bon nombre des principaux pays d’Afrique subsaharienne. Par conséquent, les pays exportateurs de pétrole, comme le Nigéria et l’Angola mais aussi la plupart des pays de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale, continuent à faire face à une situation économique particulièrement délicate. Les pays exportateurs de produits de base hors énergie, comme l’Afrique du Sud, le Ghana et la Zambie, ont eux aussi pâti de la baisse des cours. Plusieurs pays d’Afrique australe et orientale, dont l’Éthiopie, le Malawi et le Zimbabwe, subissent une grave sécheresse qui met des millions de personnes en danger d’insécurité alimentaire.
Cependant, Mme Sayeh a souligné que les perspectives restent favorables. « Beaucoup de pays de la région continuent d’enregistrer une croissance vigoureuse. Concrètement, la plupart des importateurs de pétrole s’en sortent généralement mieux, avec des taux de croissance dépassant 5 %, notamment en Côte d’Ivoire, au Kenya et au Sénégal et dans beaucoup de pays à faible revenu. Dans la majorité de ces pays, la croissance est tirée par les investissements d’infrastructure et par la vigueur de la consommation privée. Le repli des cours du pétrole a également profité à beaucoup de ces pays, bien que la baisse des prix des autres produits de base qu’ils exportent, ainsi que des dépréciations monétaires, aient annulé en partie ces gains. De manière générale, les perspectives de croissance à moyen terme restent favorables, car les ressorts intérieurs fondamentaux de la croissance de ces dix dernières années n’ont pas disparu. En particulier, la nette amélioration du climat des affaires dans la région et la démographie favorable devraient favoriser la croissance à moyen terme.
« Face à la diminution rapide de leur marge de manœuvre budgétaire et de leurs réserves de change et aux contraintes de financement, les pays exportateurs de matières premières devraient réagir de manière rapide et énergique au choc pour éviter tout ajustement désordonné. Étant donné que les recettes provenant du secteur des industries extractives vont sans doute rester durablement basses, beaucoup des pays concernés doivent aussi absolument endiguer leur déficit budgétaire et constituer une base d’imposition viable dans le reste de l’économie. Pour les pays non membres d’unions monétaires, la flexibilité du taux de change, dans le cadre d’un ensemble plus vaste de mesures macroéconomiques, devrait aussi faire partie de la première ligne de défense.
«Compte tenu du resserrement marqué des conditions financières extérieures, les pays qui ont accès aux marchés financiers et dont les déficits budgétaires et courants sont élevés depuis quelques années devront aussi recadrer leur politique budgétaire de manière à reconstituer des amortisseurs aujourd’hui très amoindris et à atténuer les vulnérabilités qu’entraînerait une nouvelle dégradation des conditions extérieures. »