Le dernier bulletin de l'OMS dénonce le fait que les soins obstétricaux d'urgence soient difficilement accessibles et peu abordables au Mali, entraînant en plus des décès maternels, des conséquences financières catastrophiques sur les ménages.
L'OMS a évalué les dépenses catastrophiques en soins obstétricaux d'urgence ont à différents niveaux, et a étudié les facteurs associés par régression logistique à partir des données de 484 urgences obstétricales et d'une enquête auprès d'un échantillon imbriqué de 56 ménages maliens.
Les observations sont alarmantes : les dépenses moyennes étaient de 152 dollars USD (soit 71 535 francs CFA), et 20,7 à 53,5% des ménages faisaient face à des dépenses catastrophiques. Des dépenses élevées pour les soins obstétricaux d'urgence ont forcé 44,6% des ménages à réduire leur consommation alimentaire, et 23,2% d'entre eux étaient encore endettés, dix mois à deux ans et demi plus tard.
« Nous avons constaté que 44,6% des familles ayant subi ces coûts élevés ont été contraintes de réduire leur consommation alimentaire, tandis que 23,2% d'entre elles étaient toujours endettées 10 mois à deux ans et demi après la naissance », indique Pierre Fournier, co-auteur de l'étude et directeur de l'axe santé mondiale à l'Université de Montréal au Canada.
Malgré la politique d'exonération de frais pour les césariennes et le système de maternité de référence, conçu pour réduire la charge financière des soins obstétricaux d'urgence, les femmes ayant subi une césarienne ont continué à faire face à des dépenses catastrophiques, en particulier lorsque les médicaments prescrits n'étaient pas inclus dans les kits de césarienne fournis par le gouvernement.
Le gouvernement du Mali avait mis en place en 2002 un système de santé national visant à faire baisser les taux très élevés de mortalité féminine liée à la grossesse et à l'accouchement.
Si la mesure, couplée à la suppression des frais de césarienne dans les établissements de santé en 2005, a permis aux femmes enceintes dans le besoin d'être envoyées à l'hôpital le plus proche, l'étude constate que les dépenses associées sont toujours trop importantes pour les ménages maliens.
En effet, les familles doivent encore payer les médicaments prescrits (antibiotiques, analgésiques, à savoir les antihypertenseurs, les anticonvulsivants et les utérotoniques) et les frais de transport d'urgence non pris en charge dans les kits de césarienne offerts par le gouvernement malien.
En outre, comme le montre l étude, ces frais élevés peuvent entraîner de graves conséquences durables qui minent le bien-être de familles entières, comme l'insécurité alimentaire, l'endettement et l'appauvrissement général.
Malgré le fait que les politiques mises en place au Mali ont peut-être contribué à réduire les délais de traitement et les frais supportés par les ménages, elles n'ont pas réussi à éliminer les dépenses catastrophiques résultant du traitement des complications obstétricales.
« Bien que ces efforts soient louables, le gouvernement doit aussi garantir que le système soit correctement financé, afin que les gens ne risquent pas la ruine financière », explique Catherine Arsenault, co-auteur de l'étude de l'OMS.
En somme, l étude suggère au gouvernement du Mali de fournir gratuitement des médicaments et de passer à un système de référence plus durable, financé au niveau national, qui permettrait de réduire les dépenses catastrophiques pour les ménages en situation d'urgence obstétricale.
Telle qu'elle est actuellement mise en Suvre, l'exemption de droits pour les femmes subissant une césarienne n'est « pas suffisante pour éliminer le risque de dépenses trop élevées ». D'une part, des kits gratuits de césariennes sont insuffisants pour la gestion des césariennes compliquées, et d'autre part, les femmes qui ne se livrent pas aux césariennes ne sont protégées par aucune police.
« Un système d'orientation de maternité financé au niveau national, plutôt que par les districts, pourrait également être plus efficace pour réduire les obstacles financiers d'une manière durable. Ce serait une étape vers l achèvement de l'équité dans l'accès aux soins de santé et vers la réduction des conséquences des complications obstétricales », conclut le rapport.